Île Retour sur l'île

L'équipage des HLM


Ils tiennent le supermarché local, ils inscrivent leurs enfants à l'école, ils pilotent la navette ou le canot de sauvetage : les locataires de HLM remplissent souvent des fonctions indispensables à la vie courante de leur île. Et pour cause : les maires utilisent l’habitat social comme levier pour attirer cette population active et limiter l’exode des insulaires.

Portraits
À l'image de ces habitants de Molène, Batz et Bréhat, les locataires des HLM ont tous un rôle important dans la vie de leur île.

« Pour vivre à Molène, viendrais-tu sur le canot de sauvetage ? »

« Un jour, on était en vacances dans l’archipel. On m’a demandé “Si tu venais habiter à Molène, est-ce que tu viendrais sur le canot de sauvetage avec nous ?” » se souvient Joël Bousset, qui habite, depuis cinq ans, un des HLM de l’île. « J’ai répondu oui sans réfléchir, et je pense que c’est un peu grâce à ça qu’on a eu un premier logement. Le maire, qui était patron du canot de sauvetage, avait une maison disponible et nous a permis de nous installer. » Ce bateau a deux fonctions pour l'île : le sauvetage en mer et le transport sanitaire. L’ancien de la DCNS (groupe industriel français spécialisé dans l'industrie navale) compte une cinquantaine de sorties par an à son bord. Et il ne regrette pas son choix. « C’est très compliqué de trouver une location à l’année, voire quasiment impossible. Et Molène n’a pas une population très importante et elle est quand même largement vieillissante, donc à 65 ans, on fait presque jeune », s'amuse ce moustachu à la retraite. Lui et sa femme Mireille disposent d'une maison de 75 m², plus un grenier aménagé, d'un petit jardin et d'une vue sur la mer depuis un trois pièces. Le tout pour 470 € par mois. Un tarif inespéré sur une île au marché immobilier onéreux.

Maison
Joël Bousset et sa femme Mireille dans leur logement social.

« J’ai obtenu mon HLM au moment où la compagnie maritime m’a engagé »

Une autre façon de participer à la vie d'une île quand on a le pied marin est de piloter la navette qui la relie au continent. C'est le cas de Pascal Méric, venu de Paris il y a 20 ans pour s'installer sur l'île de Batz. Il y occupe un logement social situé au pied du phare.

Découvrez le lieu de vie de Pascal Méric sur l'île de Batz.

« Nous sommes cinq, c’est probablement pour cela qu’on a obtenu le HLM »

À Bréhat, Dominique Sicher est connu pour les visites qu’il propose à bord de son voilier. Mais participer à la vie quotidienne de l'île ne donne pas forcément droit à un logement social. En concurrence avec une autre famille moins nombreuse, les Sicher ont finalement obtenu un HLM en avril 2017 grâce à leurs trois enfants. En les inscrivant dans l'école de la commune, les effectifs de l'établissement - qui compte une trentaine d’élèves - ont augmenté. De retour des courses sur le continent, Dominique raconte son arrivée sur l'île.

« À moins que des gens viennent s’installer avec des enfants, on partira »

Les logements sociaux permettent aussi à de jeunes familles de venir s'installer. C'est le cas des Molénais Élodie Benoit et Thomas Delerue, 22 et 24 ans, qui viennent d'avoir un enfant. Élodie travaille à la crêperie locale et pour la compagnie de bateau Penn ar Bed, tandis que Thomas gère depuis octobre 2016 le seul supermarché de l'île. « À la base, on est arrivés à Molène chez mes parents. Un an après notre demande, on a obtenu notre propre logement. Avec le petit, c’était un gros plus pour pouvoir rester à Molène. » Depuis presque chaque pièce de son logement, la famille a vue sur mer. Le loyer : 450 € pour 85 m². « On ne serait pas restés longtemps chez ses parents, c’est vrai que le logement social aide beaucoup. » Seul bémol : l'école est fréquentée par très peu d'élèves. La classe de maternelle ne compte actuellement que deux soeurs, une de 4 ans, l’autre de 6. Mathieu, 10 mois et demi, risque donc de ne fréquenter aucun enfant de son âge.

« Le problème, c’est que lui, quand il ira à l’école, il sera tout seul. Personnellement, je ne veux pas qu’il soit tout seul, parce que l’école, c’est aussi pour se sociabiliser un petit peu. Donc, sauf si des gens viennent s’installer avec des enfants, dans deux ans et demi, on n’est plus là », explique Elodie. Leur activité dans l'un des seuls commerces de l'île est indispensable, mais les tout jeunes parents pensent déjà au futur : vont-ils rester habiter à Molène quand aucun enfant de l'école n'approche l'âge de leur fils ?

Maison
Élodie Benoit et Thomas Delerue avec leur fils.

Pour ces îliens, l'accès à un HLM a résulté d'une démarche donnant-donnant. Presque tout le monde a un rôle à jouer dans ces territoires réduits, et il faut souvent justifier d'un profil utile pour accéder aux quelques logements sociaux disponibles, bien plus abordables que le parc privé.

Cliquez sur la boussole pour accéder au menu !